L'homéopathie en mouvement

Discerner le simillimum, entrevoir l’homéopathie. 1ere Partie

 

INTRODUCTION

En rassemblant mes notes je me suis demandé comment éviter de reprendre ligne par ligne l’Organon en entier puisque tout ce que je vais exposer s’y trouve consigné. J’envisage donc le présent travail comme une timide approche (que j’espère la plus sympathique possible) à l’étude de l’Organon afin d’inciter le lecteur a poursuivre plus avant l’étude de cet ouvrage fondamental, passionnant et émouvant.

 

Au bout de 15 ans à enseigner l’homéopathie, tiens à rapporter ici le fruit :

 

de ma pratique personnelle. Depuis le début des années 80, sous la férule de mon père Georges, celle-ci découle de nombreux ratages cliniques initiaux et de mon acharnement dans l’apprentissage des principes énoncés par nos grands prédécesseurs comme Hahnemann, Hering, Kent. Les nouvelles idées de certains auteurs modernes comme Vithoulkas et mon ami Kaviraj m’ont été précieuses aussi pour stimuler mon intellect et tenter de faire le tri en fonction de mon acquis.

de l’observation des difficultés des étudiants. Les projections vidéos et nos séminaires cliniques se sont révélés précieux dans un but pédagogique mais m’ont aussi donné l’opportunité d’observer un grand nombre de fois comment les novices s’y prennent pour étudier un cas et déterminer ainsi les erreurs les plus fréquentes dans l’approche homoeopathique.

L’homéopathie ne pardonne pas les demi-mesures, elle demande qu’on s’investisse complètement dans sa démarche sous peine de stagner et de se contenter de quelques coups chanceux. Trouver un médicament indiqué n’est encore rien si l’on ne sait pas gérer le cas, si l’on ne sait pas à quel moment renouveler, si l’on ignore la sensibilité du sujet, et si l’on est incapable de déduire un pronostic en fonction de l’évolution des symptômes.

 

Ce n’est qu’au prix de beaucoup de temps et d’efforts que l’on aura le plaisir de réussir de plus en plus de prescriptions. Devant les résultats souvent spectaculaires, on se sent de plus en plus stimulé et on puise dans l’enthousiasme de ses patients l’énergie de continuer de travailler et d’approfondir malgré les sarcasmes des tenants de l’ancienne médecine, souvent aveugles volontaires.

 

Bien vite, si l’on se prend au jeu, cela en devient presque une drogue. Quoi de plus stimulant et de rétribuant en effet que d’avoir résolu ce que j’appelle l’équation du malade ? Quoi demander de plus beau que de rétablir la santé ?

 

Nous allons développer deux parties : l’une développera les bases théoriques de l’homéopathie, tandis que dans la seconde partie nous essaierons de cerner les qualités requises pour devenir homéopathe et les écueils à éviter.

 

I. CHANGEMENT DE PARADIGME

L’homéopathie représente un véritable bouleversement dans notre compréhension de la médecine et des phénomènes morbides, du moins tels qu’on les enseigne à la Faculté. Ne pas se donner la peine d’effectuer ce changement de mode de pensée conduit avec certitude à l’échec et de pitoyables prescriptions à la sauvette ou au petit bonheur la chance.

 

Au bout de quelques doses de Folliculinum pour le cycle ou de Belladonna contre la fièvre, le prescripteur normalement cérébré aura vite cru faire le tour de l’ « homéopathie » pour constater son inefficacité (et même sa nocivité car bien des femmes présentent ensuite des troubles chroniques à cause de ce gavage prescrit à l’aveuglette).

 

En France les choses sont allées tellement loin qu’on a cru ériger un nouveau système en simplifiant à l’extrême l’héritage de Hahnemann. L’écriture simplifiée « homéopathie » en est le symbole puisque la racine grecque homoeon –semblable, ressemblant– est remplacée parhomeon –identique–, ce qui constitue un grave contresens… Pour nous permettre un accès plus facile par les moteurs de recherches, nous avons dû nous aussi nous mettre à cette façon d’écrire… mais bien à contrecœur!

 

LES TROIS CHEMINS

 

L’un des premiers points que je désire souligner est le suivant : l’homéopathie nous montre qu’il n’y a que trois chemins possible pour traiter les patients. Voici le texte du Fondateur :

 

22. — Pour guérir, c’est-à-dire pour convertir les maladies en l’état de santé, il n’y a rien d’autre à faire que d’éliminer « l’universalité » de leurs symptômes (c’est-à-dire de leurs manifestations objectives et subjectives).

 

Les propriétés thérapeutiques des médicaments résident exclusivement dans leur faculté de provoquer des symptômes pathologiques chez l’homme sain et d’en faire disparaître chez les malades.

 

En conséquence, les médicaments ne prennent le caractère de remèdes, et ne deviennent capables d’anéantir les maladies, qu’en provoquant certains accidents et symptômes, soit en suscitant un certain état pathologique artificiel susceptible de détruire et d’éliminer les symptômes déjà existants, c’est-à-dire l’état morbide naturel à guérir.

 

Il en résulte également que les médicaments qui ont témoigné le plus manifestement la faculté de provoquer des symptômes semblables (homéopathie) ou des symptômes contraires (énantiopathie) à cette maladie (a) répondent le mieux à la totalité des symptômes de celle-ci. L’expérience seule doit démontrer s’il convient d’opposer à ces troubles morbides des symptômes médicamenteux (pathogénésiques) similaires, ou contraires, pour faire disparaître les symptômes pathologiques existants dans le but de rétablir la santé de la manière la plus facile, la plus certaine et la plus permanente.

 

(a) A part ces deux méthodes thérapeutiques possibles, il y en a encore une troisième, la méthode allopathique, d’après laquelle on prescrit des médicaments dont les symptômes n’ont aucun rapport direct, pathogénésique, avec l’état morbide, n’étant donc ni semblables, ni opposés aux symptômes de la maladie, mais absolument hétérogènes.

 

Cette méthode, comme je l’ai déjà exposé ailleurs, se joue de la vie des malades d’une façon inexcusable et criminelle, en utilisant sur de pures conjectures, à doses massives et réitérées, des médicaments dangereusement violents, aux actions inconnues.

 

De plus, elle prétend dériver le mal vers d’autres régions, par des procédés, hélas, douloureux. L’allopathie soutire les sucs vitaux et épuise les forces du malade, le vidant par le haut et par le bas, le forçant à transpirer ou à saliver, mais surtout, comme ]e veut la routine régnante, pur l’usage aveugle et sans ménagement de saignées profuses, gaspillage de sang irremplaçable! Tout cela, sous le prétexte que le médecin doit imiter et favoriser la nature malade dans les efforts qu’elle fait pour se rétablir.

 

Cette méthode ne réalise pas combien il est insensé de vouloir imiter et favoriser les tentatives vraiment très imparfaites et le plus souvent inopportunes de l’énergie vitale aveugle, purement instinctive et dénuée de raison. Ce principe de vie n’a été mis en nous que pour maintenir, tant que nous sommes en santé, notre équilibre biologique et non pour se guérir lui-même en cas de maladie; car s’il jouissait de cette enviable possibilité, jamais notre organisme ne pourrait tomber malade.

 

Atteinte par des agents nocifs, notre énergie vitale ne peut faire autrement que d’exprimer la rupture de son équilibre par des perturbations dans les fonctions normales de l’organisme et par des sensations douloureuses, réclamant le secours d’un médecin qualifié. Si elle ne l’obtient pas, elle s’efforce alors, par l’aggravation des troubles et surtout par de violentes évacuations à se mettre coûte que coûte hors de danger, souvent au prix des plus grands sacrifices, au prix même de la vie.

 

Pour arriver à guérir, l’énergie vitale, pathologiquement désaccordée, possède si peu d’aptitudes, qu’elle ne mérite pas d’être imitée, puisque tous les changements de l’état de santé et les symptômes qu’elle engendre dans l’organisme constituent précisément la maladie elle-même! Quel est le médecin sensé qui, à moins de ne pas craindre de risquer la vie de son malade, voudrait l’imiter pour guérir ?

 

Hum ! Pensez vous que le texte qui date de 1843 ait pris une seule ride ? La situation est toujours désespérément la même qu’à l’époque de Hahnemann. Entendons nous bien : la médecine a fait des progrès dans le traitement des urgences et dans la chirurgie, grâce notamment au progrès technologiques. Mais pour le reste, où en sommes-nous ? De maquillage des symptômes en maquillage des symptômes, les pathologies sont sans cesse refoulées sur un plan de plus en plus profond. Je prétends que la médecine classique est en train de détruire de la santé avec un acharnement qui n’a d’égal que son aveuglement.

 

23. — Or, toute expérience scientifique et toutes les recherches faites avec soin nous convainquent que des symptômes pathologiques persistants, loin de pouvoir être effacés et anéantis par des symptômes médicamenteux opposés (comme dans la méthode antipathique, énantiopathique ou palliative), après avoir semblé pendant quelque temps se calmer, surgissent au contraire avec autant plus d’intensité et s’aggravent plus manifestement (cf. § 58 à 62 et § 69) (*).

 

Hahnemann démontre dans les aphorismes qui précèdent de nombreux points qui mériteraient à eux seuls des pages de développement. Nous retiendrons ici que :

 

a) ayant démontré que l’organisme réagit comme une totalité sans qu’il soit possible de discriminer un organe par rapport aux autres

 

b) il définit les 3 chemins possibles dans la façon d’administrer un médicament actif quel qu’il soit : soit parce qu’il peut créer un tableau diamétralement opposé à la maladie naturelle, soit une image semblable, soit on peut contrecarrer un ou plusieurs signes gênants (ce que fait encore et toujours l’ancienne médecine).

 

Bien avant que l’on parle de médecine “holistique”, l’homéopathie nous conduisait déjà à renoncer à la vision fragmentaire, limitée et arbitraire de l’organe ou de la pathologie, tout en renonçant aussi aux « explications » physiopathologiques des maladies car on en perçoit dès lors l’inanité. Le patient constitue une entité unique et indivisible hermétique à l’analyse réductionniste.

 

 

SOIGNEZ LE MALADE ET VOUS GUÉRIREZ LES ORGANES !

 

Voici une maxime de Hahnemann, reprise par tous ceux qui l’ont suivi, et qui résume parfaitement la démarche homéopathique.

 

Soigner le malade : qu’est ce que cela signifie ? La vieille médecine va pouvoir nous éclairer. Prenons un enfant qui fait des otites tout l’hiver. On va lui traiter chaque otite avec le tout dernier arsenal à la mode, à savoir l’antibiotique le plus récent, l’anti-inflammatoire le plus performant, quelques gouttes dans l’oreille au besoin. Ensuite, au vu des rechutes, le spécialiste proposera l’ablation des végétations qui jouent indiscutablement un rôle mécanique perturbateur. Pendant qu’on s’occupe de ses oreilles, d’autres spécialistes s’occuperont aussi de sa dermatose, car l’enfant présente aussi de l’eczéma. En outre, ce bonhomme agité a toutes les peines du monde à trouver le sommeil, aussi faudra-t-il lui adjoindre un traitement pour le faire dormir. Si l’on poursuit les investigations, les tests révéleront certainement une allergie à un ou plusieurs allergènes, ce qui ne manquera pas de faire les choux gras des allergologues, et des fabricants de médicaments car il faudra aussi que notre petit malade soit traité pour cela. Caricature direz-vous ? Pas du tout car l’exemple que je cite représente notre pain quotidien et illustre fort bien le raisonnement spécieux qu’on nous a inculqué à la Faculté, qui consiste à traiter les maladies, mais pas les malades.

 

Je prends un gifle en tant que médecin chaque fois qu’une mère amène son enfant en ayant le bon sens de nous dire : « j’arrête tout, il faut trouver un médicament pour soigner mon enfant, il faut qu’il soit vraiment malade de partout pour faire tout cela ». Eh oui, faut-il que le bon sens de ces mères soit préservé grâce à l’absence des grandes œillères que sont les diplômes ; l’arbre ne leur cache pas la forêt, et elles perçoivent intuitivement l’évidence : seule une perturbation générale touchant l’ensemble de l’organisme permet de rendre compte que chacune des parties, mal gouvernées, puisse devenir défaillante et présenter des symptômes.

 

Dès lors il est clair qu’à travers chaque partie malade, c’est le tout qui s’exprime.

 

LES LIMITES DU RÉDUCTIONNISME

 

Dès lors aussi il devient clair que l’ancien système invente les mirages qu’elle prétend traiter : n’oublions pas que la souffrance appartient au malade et que ce sont les médecins l’ont systématisée en maladies. En d’autres termes, la maladie est une notion médicale purement artificielle qui consiste à dénommer un groupe de symptômes communs à tous les malades. Ce mode de pensée autorise à considérer le syndrome comme une entité virtuelle déconnectée du patient. Nous voici à l’apogée du raisonnement de Claude Bernard qui nous a certes permis d’immenses progrès dans la physiologie mais qui est aussi responsable de nos plus grands errements ; ne serait-il pas bon qu’enfin, après un excès d’analyse, nous en revenions à la synthèse ? Doit-on rappeler qu’une seule cellule primordiale a fini par se diviser en milliards d’autres cellules, que celles-ci se sont organisées en organes selon un processus qui nous échappe totalement ? Doit-on rappeler qu’il faut bien dès lors qu’il existe un mécanisme régulateur général, sorte de chef d’orchestre qui veille à l’harmonie du tout non seulement lors de sa genèse mais aussi pour son entretien quotidien ?

 

Peut-on seulement se faire une idée de l’effroyable complexité de ce mécanisme qui veille à chaque seconde à ce que toutes les cellules fonctionnent harmonieusement de sorte que les fonctions physiologiques soient maintenues, et qu’entre autres aucun tissu anormal n’apparaisse ? Le peu que nous sachions de la physiologie ne dérange pas la médecine traditionnelle pour interférer allègrement à l’aide de quelques drogues. De la sorte, et en l’absence complète de lois permettant de guider la prescription, le “progrès” consiste à dénoncer les erreurs commises précédemment cependant que l’on commet celles qui seront dénoncées par la suite…

 

Ainsi, pour revenir à notre petit malade, que fait par exemple la vieille médecine de sa peur bleue du noir ou de l’orage, de sa transpiration de la tête au point de tremper son oreiller, du fait qu’il ajoute plein de sel dans ses aliments, de ses grincements de dents pendant qu’il dort, de sa constipation opiniâtre avec des selles énormes qui bouchent les toilettes ? Réponse : rien, strictement rien. Ces symptômes ne figurant au catalogue d’aucune maladie, on s’arroge donc le droit de les négliger royalement. Voilà une attitude artificielle qui finit par coûter fort cher à nos patients et à la société (laquelle semble d’ailleurs n’en avoir plus les moyens).

 

Pour résumer : le patient se comporte comme une boite noire dont nous ne pourrons jamais élucider tous les principes de fonctionnement. Force est de constater qu’il se comporte comme une totalité dont le dérèglement produit des symptômes qui nous sont perceptibles. Faute de pouvoir connaître l’infinie complexité des mécanismes de fonctionnement internes (approche physiopathologique classique directement dérivée du réductionnisme), il ne nous reste plus qu’à étudier les propriétés personnelles de chaque patient soumis à son environnement ; propriétés qui expriment à leur manière l’“intérieur” invisible.

 

Organon. Le §7 illustre précisément les notions qui précèdent.

 

7 — Puisqu’on ne peut connaître une maladie qu’exclusivement par sa symptomatologie, lorsqu’il n’y a pas de causes évidentes — causa occasionalis (a) — qui l’occasionnent ou l’entretiennent, il est clair que les symptômes seuls doivent servir de guide dans le choix des moyens propres à la guérison. Toutefois il conviendra de ne pas négliger la présence possible d’une diathèse morbide (miasme) et de circonstances accessoires (§ 5).

 

C’est donc l’ensemble des symptômes, dont l’image extérieure est l’expression de l’essence intérieure de la maladie , c’est à dire de l’énergie vitale désaccordée, c’est cette intégralité des symptômes qui doit être la principale ou la seule voie par laquelle la maladie nous permet de trouver le remède nécessaire, la seule qui puisse en déterminer le choix le mieux approprié.

 

En un mot, dans tout cas morbide individuel, la totalité des symptômes (b) doit être pour le médecin la préoccupation principale, l’objet unique de toute son attention, la seule chose devant être éliminée par son intervention en vue de la guérison, afin de transformer la maladie en état de santé.

 

(a) Il tombe sous le sens que tout médecin raisonnable élimine d’abord cette cause occasionnelle; l’indisposition dès lors disparaît habituellement d’elle-même. Ainsi il éloigne de la chambre les fleurs trop odorantes qui provoquent la lipothymie ou des manifestations hystériques; il enlève de la cornée le corps étranger qui produit l’ophtalmie; il dégage pour mieux le réajuster le bandage trop serré pouvant causer la gangrène d’un membre blessé; il dénude afin de la ligaturer l’artère lésée dont l’hémorragie pourrait causer la syncope; il tente de provoquer par le vomissement l’évacuation des baies de belladone avalées; il extrait les corps étrangers ayant été introduits dans les orifices naturels du corps (nez, gorge, oreilles, voies uro-génitales, rectum); il broie les calculs dans la vessie; il ouvre l’anus imperforé du nouveau-né, etc…

 

(b) Ne sachant souvent à quel autre expédient recourir, l’ancienne Ecole a de tout temps cherché à combattre dans les maladies et si possible à supprimer par des médicaments, un seul des symptômes multiples qu’elles présentent — méthode bornée, connue sous le nom de médecine symptomatique.

 

Elle a soulevé à juste titre le mépris général, non seulement parce qu’elle ne procure aucun avantage réel, mais encore parce qu’elle cause beaucoup de mal.

 

Un seul des symptômes présents n’est pas plus la maladie elle-même qu’une seule jambe ne constitue l’homme entier. Cette méthode était d’autant plus condamnable, qu’en traitant ainsi un tel symptôme isolé exclusivement par un remède contraire (donc d’une manière uniquement énantiopathique et palliative) le mal, après un soulagement de courte durée, reparaissait d’autant plus aggravé.

 

UNE MÉDECINE DE L’ÉNERGIE : NOTION DE FORCE VITALE

 

 

Cette seconde notion essentielle de l’homéopathie marque aussi les limites de sa compréhension par beaucoup d’esprits demeurés matérialistes.

 

Ces notions essentielles reposent sur quelques paragraphes de l’Organon que je relis toujours avec la même émotion. Songez que ces lignes ont été rédigées en 1843!

 

11. — Quand l’homme tombe malade, cette énergie vitale immatérielle (principe de vie), active par elle-même et partout présente dans son corps, est, dès le début de la maladie, la seule qui ressente l’influence dynamique (a) de l’agent morbide hostile à la vie.

 

Seul le principe vital, après avoir été ainsi désaccordé, peut procurer à l’organisme les sensations désagréables qu’il éprouve et le pousser aux actions insolites que nous appelons maladies. Car, étant invisible par elle-même et reconnaissable seulement par ses effets dans l’organisme, cette entité énergétique n’exprime et ne peut révéler son dérèglement que par des manifestations pathologiques dans les sensations et fonctions, c’est-à-dire par des symptômes morbides (manifestations qui seules sont accessibles aux sens de l’observateur et du médecin).

 

(a) Qu’entend-on par influence dynamique, par force dynamique? Nous constatons que notre Terre, grâce à une force mystérieuse, invisible, fait tourner la Lune autour d’elle en vingt-huit jours et quelques heures, et que cela, combiné avec l’attraction solaire, produit dans nos mers alternativement à des heures déterminées (avec quelques différences au moment de la pleine et nouvelle Lune) le flux et le reflux , c’est-à-dire la marée.

 

Nous voyons cela et nous nous en étonnons parce que nos sens ne se rendent pas compte de quelle manière cela se produit. Evidemment il ne s’agit pas là d’un travail réalisé par des machines, par des instruments mécaniques comme ceux qu’utilisent les hommes. Et nous voyons ainsi, autour de nous, encore bien d’autres faits résultant de l’action d’une substance sur une autre, sans qu’on puisse y reconnaître un enchaînement visible de cause à effet. L’homme cultivé, habitué à la comparaison et à la déduction, peut seul s’en faire une idée transcendante. En réfléchissant sur ces phénomènes, il les conçoit comme dégagés de toute influence matérielle ou mécanique. Il appelle ces effets dynamiques, virtuels, entendant par là qu’ils résultent de la puissance et de l’action souveraine, spécifique et pure, c’est-à-dire sans relation matérielle, d’un élément sur un autre.

 

Ainsi, par exemple, l’action dynamique des influences pathogènes sur l’homme sain, de même que la puissance dynamique des médicaments sur le principe vital pour rétablir la santé de l’être humain, ne sont rien autre qu’une « contagion » absolument exempte de toute influence matérielle ou mécanique, comme l’est la force d’un aimant quand il attire puissamment un morceau de fer ou d’acier placé à proximité. On voit que le morceau de fer est attiré par une extrémité (pôle) de l’aimant, mais on ne voit pas comment cela se produit. Cette force invisible de l’aimant n’a besoin pour attirer le fer d’aucun moyen mécanique (matériel), crochet ou levier; elle l’attire et agit sur lui ou sur une aiguille d’acier, par sa force purement immatérielle, invisible — comme spirituelle en quelque sorte — et qui lui est propre. C’est là une manifestation dynamique. Elle communique ainsi invisiblement (dynamiquement) la force magnétielle à l’aiguille d’acier. Celle-ci devient magnétique elle aussi, même sans aucun contact avec l’aimant, si elle se trouve à une distance assez courte de lui et communique à son tour à d’autres aiguilles d’acier une propriété magnétique (dynamique) semblable à celle qu’elle vient d’acquérir.

 

D’une manière analogue un enfant atteint de variole ou de rougeole, contaminera en l’approchant un enfant bien portant et cela sans le toucher. Cette contamination s’opère d’une façon invisible (dynamique), à distance, sans qu’aucune parcelle matérielle n’ait été communiquée ou ait pu être transmise de l’un à l’autre, pas plus que du pôle de l’aimant à l’aiguille d’acier voisine. Une influence spécifique purement immatérielle a propagé à l’enfant placé dans le voisinage, la variole ou la rougeole, d’une manière similaire à celle dont l’aimant a transmis la propriété magnétique à l’aiguille voisine.

 

L’action des médicaments sur l’homme vivant doit être jugée d’une façon analogue. Les substances naturelles qui s’avèrent être des médicaments, ne le sont qu’autant qu’elles ont le pouvoir (spécifique à chacune d’elles) de modifier l’organisme humain, grâce à une influence dynamique, incorporelle (par l’intermédiaire de la cellule vivante et sensible) s’exerçant sur le principe vital immatériel qui régit la vie.

 

Seul le pouvoir de provoquer des changements dans l’état de la vie animale confère des propriétés médicinales aux substances naturelles, que dans un sens plus restreint nous appelons médicaments. Ce n’est qu’à ce principe vital, incorporel, que s’étend l’influence immatérielle (dynamique) des médicaments capables d’agir sur l’organisme. De même, la proximité du pôle d’un aimant ne peut communiquer à l’acier qu’une force magnétique immatérielle, (comme par une espèce de contagion) et non transmettre d’autres propriétés purement physiques (par exemple plus de dureté ou de malléabilité).

 

C’est ainsi que chaque substance médicamenteuse, par une sorte de contagion modifie l’état de l’homme d’une manière qui est essentiellement spécifique, et non comme le ferait quelqu’autre médicament, cela aussi certainement que le voisinage d’un enfant varioleux ne communiquera à un enfant bien portant que la variole et jamais la rougeole.

 

C’est dynamiquement, à la façon d’une contagion, que cette influence des médicaments se produit sur notre organisme et cela sans la moindre transmission de parcelle matérielle de la substance médicamenteuse.

 

La plus petite dose d’un médicament très consciencieusement préparé et dynamisé — dans laquelle, d’après les calculs, il y a si peu de matière, que son infime quantité ne peut être imaginée ou conçue par les meilleurs mathématiciens — manifeste, dans le cas de la maladie à laquelle ce médicament convient, beaucoup plus de puissance curative que de fortes doses matérielles du même médicament. Cette dose extrêmement subtile, ne contenant presque uniquement que la puissance médicinale immatérielle, dégagée et libérée, exercera, par la seule action de cette puissance dynamique, des effets si considérables, qu’il serait impossible d’en obtenir de semblables avec la substance médicamenteuse à l’état brut, même absorbée à dose massive.

 

Ce n’est pas dans les atomes matériels de ces médicaments fortement dynamisés, ni dans la grandeur de leur surface physique ou mathématique (interprétation assez grossière du reste, mais vaine, du pouvoir considérable des remèdes dynamisés) que réside, sous une forme invisible, une puissance médicinale spécifique. C’est au contraire dans le tout petit globule imprégné ou dans sa dilution, que demeure cette énergie spécifique dégagée et libérée autant qu’il est possible de sa substance brute. Cette puissance médicamenteuse, au moindre contact de la cellule animale vivante, agit dynamiquement sur tout l’organisme, (sans lui communiquer la moindre parcelle matérielle quelconque, si subtile soit-elle) et d’autant plus fortement que par le processus de dynamisation elle est devenue plus ]ibre et plus immatérielle (§ 270).

 

Est-il absolument impossible à notre époque, qui se vante d’être si riche en esprits éclairés et réfléchis, de se représenter la puissance dynamique comme une chose incorporelle, alors que tous les jours nous voyons des phénomènes ne pouvant s’expliquer autrement? Est-ce par un vomitif absorbé à dose substantielle, dont l’action sur l’estomac provoque des mouvements antipéristaltiques, que vous éprouverez un haut-le-cœur à la vue de quelque chose de répugnant? Ne s’agit-il pas ici de l’action dynamique de ce spectacle écœurant sur votre seule imagination? (*). Est-ce par le moyen d’un levier ou d’un outil matériel visible que vous levez le bras? N’est-ce pas uniquement par la force immatérielle, dynamique de votre volonté qu’il se lève ?

 

Hé bien non, Cher Maître, visiblement notre époque, encore plus riche en esprits éclairés ( !), ceux-là même par exemple, qui ont percé les secrets de l’atome, et grâce à qui ont peut faire péter plusieurs fois la planète sans bouger les oreilles (Pierre Desproges), ces mêmes esprits ne peuvent toujours pas concevoir ce que vous dites.

 

Le paragraphe suivant est encore plus important peut-être, c’est l’une de nos pierres angulaires :

 

12.— C’est uniquement la rupture d’équilibre de l’énergie vitale qui est la cause des maladies (a).

 

Les manifestations pathologiques accessibles à nos sens, en reflétant l’intégralité des troubles internes, expriment en même temps le dérèglement de la dynamis, cette puissance intérieure, soustraite à nos regards. En un mot, elles mettent en évidence la maladie tout entière.

 

Par contre, la cessation par le traitement, de tous les troubles morbides, c’est-à-dire la disparition de tous les changements perceptibles modifiant l’état de santé, a pour effet et implique nécessairement le rétablissement du principe vital dans son intégrité et présuppose logiquement le retour à la santé de l’organisme tout entier.

 

(a) Comment l’énergie vitale détermine-t-elle l’organisme à produire des manifestations morbides, c’est-à-dire comment crée-t-elle la maladie ? De telles questions ne sont pour le thérapeute d’aucune utilité parce qu’elles lui resteront éternellement cachées. Le Maître de la Vie n’a rendu accessible à nos sens que ce qui était nécessaire et pleinement suffisant pour la guérison des maladies.

 

Imaginez-vous les haines et les sarcasmes que Hahnemann a suscités et bravés lorsqu’il écrivait ces lignes en 1843 ? Ainsi comprendrez-vous un peu mieux le sourire qui se dessine sur les lèvres d’un homéopathe quand un brave homme qui pense fermement qu’un petit bout d’ARN viral peut le tuer, lui explique du haut de ses préjugés que l’homéopathie ne peut pas agir ?

 

13.— Par conséquent la maladie (appartenant à un domaine dans lequel les procédés mécaniques de la chirurgie n’ont aucune efficacité),

 

1. N’est nullement une entité séparée (a) du tout vivant de l’organisme, quelque subtile qu’on puisse l’imaginer.

(a) Materia peccans!

2. Elle n’est pas non plus une entité isolée de l’énergie vitale, c’est-à-dire du pouvoir dynamique qui l’anime.

3. Enfin, ce n’est pas davantage une entité cachée à l’intérieur du corps, comme les allopathes la dépeignent.

 

(Une pareille chimère ne pouvait être conçue que par des cerveaux matérialistes. C’est elle qui, depuis des siècles, a poussé la médecine officielle dans toutes les funestes directions qu’elle a parcourues en l’écartant de sa véritable destination, et en la faisant considérer comme une science pernicieuse, incapable de guérir )

 

14.— Il n’y a pas de maladie curable, pas de changements morbides cachés à l’intérieur du corps, que le médecin méthodique et consciencieux ne puisse reconnaître sinon par des symptômes objectifs et par des symptômes subjectifs.

 

Ainsi l’a voulu la bonté infiniment sage du Souverain Conservateur de la vie des hommes.

 

Comment Hahnemann est il arrivé à des conclusions tellement en avance sur son époque qu’elles font aujourd’hui encore sursauter? Cliniquement, l’homéopathie étonne sans arrêt. Nous constatons tous les jours qu’un médicament qui ne peut exister ni sur le plan matériel, ni sur le plan chimique présente une action aussi puissante qu’instantanée. Dans les cas aigus, c’est à peine si le patient a le temps d’absorber son médicament qu’il commence déjà à y répondre et que ses plaintes régressent. Dans les cas chroniques les réactions peuvent être très vives initialement et on assiste souvent à une véritable déferlante de symptômes selon une chronologie dictée par la loi de Hering (des signes de plus en plus anciens réapparaissent pour disparaître à leur tour). Avec un seul et unique médicament à la fois on couvre l’ensemble des signes et des symptômes connus chez le patient, ce qui nous amène à formuler qu’une cause commune très en amont semble provoquer l’universalité du désordre que nous constatons sur les organes.

 

De fait, à mesure qu’on le pénètre de plus en plus, le système hahnemannien fait de nous des médecins vitalistes. Il devient bien vite impossible de faire l’économie de la notion d’une force vitale qui régit l’organisme bien en amont du plan matériel anatomique ou chimique.

 

Quelles preuves pouvons-nous avancer ? Nous devons au Docteur Guy Buckley Stearns d’avoir publié en 1927 au terme de 7 ans de recherches les résultats d’une étude exhaustive qui visait à connaître les effets des doses dynamisées sur les réflexes de l’organisme.

 

Ce travail, mené pour le compte de l’Association Hahnemannienne Internationale, est un modèle de rigueur et nous étonne encore de part l’habileté avec laquelle son auteur a exploité les moyens rudimentaires de l’époque. Stearns a évalué les effets des produits homéopathiques sur la contraction du muscle cardiaque, la respiration, la dilatation des capillaires sous unguéaux, et bien d’autres choses encore.

 

Parmi toutes ces expériences, le test du réflexe pupillaire demeure le plus facile à mettre en évidence. Il est à cet égard assez édifiant : à l’aide d’une simple lampe de poche on peut mettre en évidence les forte contractions ou dilatations pupillaires dès qu’une dose dynamisée est approchée à une certaine distance du sujet. Ces expériences, faciles à reproduire chez vous, feront l’objet d’un article prochainement publié, vous pourrez briller en société et montrer à l’assistance ébahie comment une pupille se contracte de façon spasmodique et anarchique en rapprochant une simple dose du sujet.

 

Il m’est difficile de ne pas établir de parallèles avec mes premières amours que sont l’astronomie et la physique des quanta. On peut en effet rapprocher les notions de force vitale et de force d’attraction universelle (comme Hahnemann le souligne d’ailleurs au §11; voir ci dessus ). Newton a décrit cette force voici trois siècles et demi pour rendre compte du comportement des corps célestes. Ce concept fructueux peut être décrit en termes mathématiques, ce qui aboutit à des lois toujours en usage aujourd’hui pour expédier des sondes sur Mars, ou mettre un satellite sur orbite. La gravitation vue du point de vue d’Einstein n’est rien d’autre qu’une courbure de l’espace temps qui oblige en quelque sorte la matière a suivre sa déformation. Si cela est avéré, ce que nous prenions pour une force ne serait dû qu’aux propriétés géométriques de l’espace.

 

De la même manière, il est possible que la force vitale en tant que telle ne soit qu’une description approchée d’un mécanisme physiologique plus complexe et plus proche de la réalité physique. Cependant le concept est bien commode et rend compte pour l’heure des phénomènes que nous observons.

 

Pour résumer. La cause des maladies repose sur un dérèglement dynamique, seul un traitement de même nature peut permettre d’espérer une guérison. Je donne la parole à Kent qui a su énoncer ces faits avec sa clarté habituelle :

 

« Le plan nutritif relève exclusivement de l’extérieur, il appartient aux tissus, c’est là que se poursuit l’assimilation. Les drogues brutes, les remèdes en substance, n’agissent que sur le plan tissulaire, sur celui des résultats pathologiques ; ils ne peuvent affecter que les effets, les conséquences de la maladie. Et l’état de déséquilibre qui y règne concerne les effets terminaux, concerne donc le plan le plus extérieur de toute maladie. Naturellement, si tout ce qui représente l’extériorité physique est troublé, l’économie entière en souffre, le corps cesse d’être alors le bon instrument réactif des forces intérieures. Mais une véritable maladie, possédant ses phases prodromiques de progrès et de déclin, ou d’allure continue, ne peut s’implanter dans notre organisme que par une cause dynamique seulement. D’où il suit nécessairement, et je ne saurais assez le répéter, que l’homme ne peut être guéri que par des médicaments atténués et dynamisés jusqu’à ce qu’ils soient similaires en nature et en qualité à la cause morbide. La cause pathogène et le médicament pathogénésique, c’est à dire celui expérimenté sur l’individu sain, doivent être similaires quant à leur nature, car des causes dissemblables ne peuvent produire des effets semblables. »

 

Suite de l’article : 2eme partie

 

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